Les années douces
Je suis un fan de Taniguchi. Je n'ai peut-être pas encore tout lu, mais tout ce que j'ai lu, de L'homme qui marche à Quartiers lointains, j'ai toujours été saisi par la tendresse que ce mangaka accordait à ses personnages et par le savoir-faire quant au rythme (relativement lent en général) donné à l'histoire.
Les Années douces sont un manga en 2 tomes, tirés du roman éponyme de Kawakami, que pour ma part, je ne connaissais pas. Mais je reconnais que je suis un piètre connaisseur de la littérature japonaise si on excepte les mangas. Et encore, même pour les mangas, je reste très limité.
La trame de l'histoire est autour de la rencontre entre Tsukiko, une femme trentenaire plutôt solitaire et son ancien professeur de japonais, veuf. Sur un tempo très lent et non linéaire, les sentiments entre ces deux personnes vont s'amplifier.
Tsukiko est une femme-enfant, qui éprouve de la peine à communiquer avec les autres, qui s'ennuie avec les hommes de son âge, qui semble à la fois se complaire dans la solitude et la regretter. Le maître (c'est comme ça qu'elle l'appelle) est lui aussi seul, mais on n'en sait pas forcément beaucoup plus, car c'est Tsukiko que l'on suit quand les deux personnages sont séparés, jamais le maître.
J'ai été touché par ce manga, comme d'habitude avec Taniguchi, parce d'une part, Tsukiko m'évoque tellement mon ex-femme que c'en est étonnant.
Mais surtout, parce que d'autre part, et pour des raisons moins personnelles, cette relation entre les deux personnes on la voit à peine évoluer, mais on voit qu'il se passe quelque chose, sur le mode de la lenteur, complètement sorti des contraintes temporelles que devraient nous imposer la société d'aujourd'hui. Vivre vite, aimer vite, jouir vite, tout ça n'entre pas en ligne de compte. Et c'est finalement ce qui fascine dans cette oeuvre.
La sensualité n'est pas absente de la relation, mais elle est ailleurs : dans les plats que choisissent ces deux personnages, qui pour l'essentiel se retrouvent au restaurant, par hasard ou à dessein. Sans avoir aucune idée du goût que peuvent avoir ces plats, je peux dire que j'ai bien pris conscience que la gastronomie japonaise ne pouvait se résumer aux sushis et aux petites brochettes pas très bonnes.
Les mangas de Taniguchi sont une des meilleures voies que je connaisse pour appréhender la finesse de la culture et du mode de vie japonais.